La Lune à la recherche d’elle-même

Une extravaganza radiophonique

En 1947, Claudel réécrit pour la radio L’Endormie, sa farce de 1887 qui le gênait énormément. Pour cela il mêle des souvenirs de L’Ours et la Lune à quelques restes de L’Endormie. Par ce travail, il tente de donner une signification à son ancienne pièce (la faire passer « de l’anecdote à la parabole ») mais aussi de remplacer le pessimisme de sa jeunesse par l’optimisme providentialiste qui caractérise ses œuvres de maturité.
Le jeune Poëte a transgressé la frontière. Il est passé dans le monde de l’envers, « de l’autre côté de la métaphore », mais aussi de la morale. Il est donc jugé par le tribunal faunesque. Avare en punitions, celui-ci le pousse dans les bras d’une femme, la Lune, « quartier du gruyère géologique en proie à la libido », qui représente toutes les tentations de la chair et de la poésie.
Sorte de dialogue socratique bouffon, la pièce propose une réflexion sur le rôle de l’amour et de la faute dans la quête du salut. Partis à la recherche d’eux-mêmes et de leur âme au milieu des fureurs bachiques de la jeunesse, le Poète et la Lune parviennent à la libération intérieure que symbolisent les béatitudes finales d’un mariage mystico-bouffon. Écrite au seuil de la mort, la pièce permet à Claudel de faire le bilan de sa vie en se moquant de lui-même et de son œuvre, mais aussi de mettre en scène la Rédemption à laquelle il aspire.

Sever Martinot-Lagarde

Bibliographie